lundi 17 novembre 2008

SEYCHELLES QUE J'AIME --- CONTES

SEYCHELLES

SEYCHELLES

SEYCHELLES

C'EST CELLES QUE J'AIME

dimanche 16 novembre 2008

PROLOGUE EN FORME DE RÊVERIE

VOICI QUELQUES CONTES. JE LES AI ÉCRITS POUR RADIO-SEYCHELLES. JE LES OFFRE AUX ENFANTS DE CES ÎLES. ILS NE

SAURONT JAMAIS SANS DOUTE COMBIEN JE LES AI AIMÉS, NI COMBIEN J'AI AIMÉ CE PAYS.

QU'ILS ME PERMETTENT DE RÊVER UN PEU :



Maldives, Laquedives, Ceylan, Madagascar, l'Île de France, Bourbon, Rodrigues et les Seychelles ...

Mahé, Praslin, Frégate, Cousin, Cousine, Silhouette, Denis, Curieuse, Félicité, La Digue, Moyenne, Sainte Anne, L'Île du Nord, Thérèse, lÎle Longue, l'Île Ronde, Conception, l'Île aux Cerfs, L'Île Aride et l'Île Anonyme ...


L'Île Anonyme ... Quel beau nom ! On aimerait savoir ... savoir qui a bien pu l'inventer !




Mais les archipels de corail ... Les Amirantes, les Farquhar, Aldabra !

Les Amirantes ... Poivre, Boudeuse, Étoile, Desneuf, Marie-Louise
Et les Bancs Africains, Rémires, Daros et Desroches ...


Farquhar ... Autrefois dénommée Juan de Nova.
Aldabra ... Aldabra-la-verte, Aldabra
L'Île aux cent cinquante mille tortues dormant sous les takamakas et les mapés ... Aldabra et son lagon :
Le plus vaste lagon du monde, d'où émergent
de minuscules îlots qui ont pour noms
Esprit, Cèdre, Michel et Moustique ...


Et pourquoi ne pas nommer l'Île Cachée, Chauve-Souris, Mamelles et Rat ?
Pourquoi ne pas nommer Albatros,Ave-Maria
l'Île-aux- fous
Petite-Soeur
Saint Pierre et Mariane ?

Je veux nommer encore Coconut, Polymnée, Astove, Cosmoledo, Pagoda, Goëlette, Wizard et Providence ...
Et puis Les îles Alphonse,
Bijoutier, Saint François et les îles Poivre : Boudeuse, Desroches, Marie-Louise.
Ah ! l'Île-aux-Chiens, Benjamin, Carcassaye, Fouquet, Pélican, Ressource et Saint Joseph !

J'aurais voulu les découvrir
Être le premier à les apercevoir ...
J'aurais voulu les nommer et nommer aussi
La Baie des Cipayes,
La baie Saint Ange,
l'Anse à la Mouche,
l'Anse Bois de rose, l'Anse Boileau,
l'Anse Grand'Barbe et l'Anse Patate et l'Anse Sévère, l'Anse Royale,
Grand'Anse et aussi la plage de Beau Vallon et celle de l'Anse Police,
La Pointe Gaulette,
La Pointe Source d'Argent,
La Pointe Cabris
Et la passe Cousin
La passe à Mathiot,
La passe l'Endormi ...
Ah ! Quatre-Bornes et Sans-Soucis, Montfleuri et ..;

Ah! Ces gens qui portent des noms fleurant bon les aventures des Poitevins, des Bretons et des Normands !
Pillay, Francourt, Hoareau, de Saint-Jorre, Confait, Vidot (prononcé Vidot', comme en Charente !)

LA POÉSIE RÊVAIT AUX SEYCHELLES. C'EST VRAI : JE L'Y AI RENCONTRÉE. VOUS NE POUVEZ LA MANQUER ... ELLE A LE PARFUM DE LA CANNELLE ET DE LA GIROFFLE ...

samedi 8 novembre 2008

LES OISEAUX ET LES FLEURS


( à Jeanne... )





La mer n'a pas toujours été bleue . les poissons n'ont pas toujours eu leurs couleurs et le corail lui-même ... En ce temps-là, la mer était grise, les poissons étaient gris, le corail était gris, tout gris ! Quelle tristesse !

Un beau matin, au moment où le soleil se levait derrière l'île de Praslin ... Qui ne s'appelait pas encore ainsi ! C'était au temps où les hommes n'habitaient pas encore dans les îles. Aucun bateau n'était encore venu jusque là. Il n'y avait ici que des tortues, des oiseaux, des roussettes et des crocodiles.

Un beau matin, donc, la mer était comme un miroir, un miroir tout gris, mais un beau miroir tout de même.

Et puis voilà qu'une fleur s'est envolée, une fleur toute blanche, une orchidée ... On l'appelle " l'orchidée paille-en-queue. On l'appelle comme ça parce qu'elle a un pétale beaucoup plus long que les autres, comme la queue de l'oiseau blanc du même nom. Et puis, cette orchidée, elle sent bon. C'est, je crois, la seule orchidée qui soit parfumée. Et quel parfum !

Donc, un beau matin, elle s'est envolée, puis elle est venue se poser sur une branche, juste au-dessus de l'eau. La mer était grise mais elle brillait comme un miroir car le soleil se levait. Et puis voilà qu'une seconde orchidée s'esst envolée elle-aussi. Elle est venue se poser sur la même branche. Elle était violette, veloutée, avec le coeur rouge carmin. Je ne sais pas son nom, mais elle est superbe : Ses pétales sont plus larges que ceux de l'orchidée paille-en-queue, par contre, ellle n'a pas d'odeur. C'est celle dont, aujourd'hui, on fait les bouquets de mariées.

En un instant, toutes les orchidées se sont envolées comme autant de papîllons. Elles se sont rassemblées en tourbillonnant sur la montagne et puis elles sont toutes venues se poser sur le même arbre, juste au bord de l'eau. L'eau de la mer était claire et transparente. Il n'y avait pas une vague, pas une ride. À la surface, le buoquet d'orchidées se reflétait ... Mon Dieu, que c'était beau ! I n'y avait personne pour rgarder ça, et c'était bien dommage ...


O ! Mais si, il y avait quelqu'un pour regarder ! Un premier poisson arriva. Il était gris, comme tous les poissons en ce temps-là. Il monta à la surface, attiré par tant de couleurs, tant de beauté. Il était tout gris mais le soleil levant en faisait un poisson d'argent. Il fit deux ronds, puis trois, puis quatre, puis il sortit la tête hors de l'eau. Quel parfum ! L'orchidée paille-en-queue embaumait. Le poisson tourne, tourne ... Il n'arrêtait plus de tourner !

Un deuxième poisson survient. Il n'a pas la même forme que le premier. En ce temps-là comme maintenant, il y avait des poissons de toutes les formes, mais tous étaient gris. Le second poisson fait un rond à la surface, deux ronds, trois ronds, quatre ronds, puis il sort la tête hors de l'eau, donne un coup de queue en l'air puis il plonge et se met à tourner dans tous les sens, aussi amoureux que le premier.
Voici toute une bande de poissons qui tournent tous en rond. Il sont amoureux fous des orchidées. À la surface de la mer, sous les éclats du soleil levant, les poissons tracent des cercles d'argent, sautent en l'air, plongent en faisant gicler des perles ... C'est le bal des poissons, c'est la farandole

Il y en a de toutes les formes et de toutes les tailles. Il y a même le marlin et l'espadon-voilier, le mérou et le perroquet. Il y a la daurade, la bonite et le thon, la carangue, le barracuda, le job et le bourgeois, le maquereau et la sardine et même le tétrodon.
Certains ont des piquants sur le dos, d'autres ont les nageoires en croissant de lune, la queue comme une faux, une voile sur le dos. L'un est pourvu d'un bec, comme un oiseau, l'autre a des dents qui ressemblent à celles des chiens. Il y en a qui sont tout plats et d'autres qui sont tout ronds. Certains sont fuselés, d'autres ressemblent à des boîtes à cigares ...

Ils tornent, tournent, tournent tous. Aucun doute, ils sont amoureux des orchidées ! Mais comment faire, quand on est dans l'eau ? Mon Dieu, mon Dieu, comment faire ?
Pendant un bon moment, les poissons ont espéré que les fleurs les rejoindraient. Ils se sont mis à faire des tours, comme des pitres, à sauter, comme des acrobates ! Certains, même, faisaient le saut périlleux, en avant et en arrière, c'était une parade éblouissante !

Et puis, comme les fleurs ne quittaient pas leurs branches, les poissons sont devenus très tristes. Plus de sauts, plus de bonds ... On tournait en rond, tristement, à la queue-leu-leu, comme à un enterrement , lentement, lentement. L'espadon était devant, le cordonnier derrière et puis, les derniers, beaucoup plus loin, tous les petits poissons qui n'ont pas de nom.

Mon Dieu, mon Dieu, quand on est dans l'eau ... Comment faire ? Alors le bourgeois se dit, ( Il était très savant, le gros bourgeois, très, très savant ! ...) Le bourgois se dit :

-" Si les orchidées ne veulent pas nous rejoindre, c'est que nous ne leur plaisons pas.Si elles ne nous aiment pas, c'est parceque nous n'avons pas de couleurs ..." Il plongea au fond de l'océan.

Allez donc savoir comment il s'y est pris ? ... Quand il remonta, il était tout habillé de rouge, avec des relets d'or !

Une orchidée se penche. Je crois bien que c'est l'orchidée paille-en-queue, celle qui est toute blanche et qui sent si bon ! À moins que ce ne soit une autre, une rouge ou bien une violette ... Cette fleur est devenue amoureuse du bourgeois. Mais comment faire, lorsqu'on est dans l'air ?

Quand ils ont vu ce qui se passait, tous les poissons ont plongé dans les profondeurs de l'océan. On ne saura jamais comment ils ont fait, mais le marlin est devenu tout bleu tandis que son cousin est devenu tout noir. Le thon devint bleu, rayé de jaune. Il y avait des poissons bigarrés de vert et d'or, d'autres arboraient une robe à pois rouges. Certains ressemblaient à des papillons, d'autres à des fleurs. La mer elle-même était devenue toute bleue. Elle l'est restée depuis, et les coraux ressemblaient à des fleurs dans un jardin.


Oui, mais ceci ne règle pas la question : les poissons sont amoureux des fleurs, les fleurs aiment les poissons ... Mais, comment faire alors que les uns vivent dans l'eau et le autres dans l'air ?

Les poissons sont restés dans l'eau. les fleurs sont restées dans l'air. Je crois bien pourtant que les uns et les autres ont fini par s'accomoder de la situation ... Pensez donc, il y a si longtemps !

Les poissons ont-ils fini par oublier les fleurs ? Et les orchidées ont-elles fini par oublier les poissons ?
Ma foi .... Les orchidées ont fini par se marier ... avec les papillons !

Parfois on entend encore les poissons pleurer, juste au moment où le soleil se lève ... Vous ne les avez jamais entendus ?

En tout cas, en tout cas ... Si la mer est bleue maintenant ... Si les poissons ont de si jolies couleurs ... En tout cas, c'est depuis ces jours-là !






À SUIVRE ....................

mardi 4 novembre 2008

LE GROS BOURGEOIS ROUGE


Dans tous les océans du monde, il y a des îles. Il y a des îles hautes. Il y a des îles basses. Dans tous les océans du monde, il y a des poissons. Il y a les poissons du grand large. Il y a les poissons des lagons. Ce ne sont pas les mêmes.

Les premiers sont les grands voyageurs. Ce sont les thons, les daurades et les espadons, ces derniers étant noirs ou bleus, les trois ayant le corps en forme de fuseau.
Les seconds sont sédentaires. Ce sont les bourgeois ... Je crois bien que, sous d'autres latitudes on les appelle des vivaneaux, et aussi les croissants et les cordonniers, par exemple. Ils ont toutes les formes et toutes les couleurs. Ils bougent peu. Ils ont souvent, tout du moins pour les plus importants d'entre eux, des ventres de propriétaires.

Des poissons pélagiques, il ne sera pas question ici. Laissons les à leurs affaires ...

Dans les lagons, à quelques exceptions près, il n'y a que des poissons tranquilles et débonnaires. L'île de Mahé, la principale des Seychelles, n'a pratiquement pas de lagon. Il y a pourtant des cordonniers, des croissants et des bourgeois, de gros bourgeois ventrus, revêtus de mailles de vermeil et d'or. Ils s'abritent dans les grottes sous-marines. De temps à autre on voit dans l'ombre scintiller leurs écailles, comme des pièces de joaillerie.

L'océan, c'est grand. C'est immense. Imaginez que vous êtes un petit cordonnier et que vous vivez au fond des eaux. C'est si vaste, l'océan, tellement immense ! Rien que d'y penser, on a le vertige ! Devant, derrière, dessus, dessous, de l'eau, de l'eau, rien que de l'eau ! Et quoi, dans cette eau ? ... Rien que d'y penser mon coeur se serre ... Des monstres avec des tentacules, des monstres avec des pinces, des monstres avec des dents, des antennes, des dards, des carapaces, des mandibules ... Et partout des yeux qui vous regardent et qui vous suivent !

Alors, imaginez, quand on est un petit cordonnier, un tout petit cordonnier tout gris, broutant des algues pour se nourrir ! Le croissant au moins, lui, il peut encore impressionner avec tous ses jaunes, ses rouges, ses ors ... Et puis, le bourgeois avec son gros ventre et ses écailles rutilantes ! Mais un cordonnier, un tout petit cordonnier ! Et puis vous vous faites balloter par les vagues et par toutes les tempêtes ... Il suffit d'un tourbillon et vous voilà obligé de vous mettre à l'abri !

Ah ! Ils sont donc bien heureux, les petits cordonniers de l'île Maurice ! Ils sont dans un lagon tout calme, tout chaud, où poussent en grandes prairies des algues tendres sous la dent.

Le peuple cordonnier s'assembla un jour. Je crois que c'était à l'Anse Lascar, là où il y a un peu de lagon et où l'on pouvait donc espérer être tranquille pour quelques heures. Il y en avait, des cordonniers ! Je sais qu'il y avait là tous les cordonniers de Mahé, mais je crois bien qu'en plus il y avait ceux de La Digue et de Praslin ...

On avait bien choisi le jour : C'était un dimanche, et c'était un quinze août ... Un jour doublement saint ! Pas une barque ne prendrait la mer, pas un pêcheur à craindre. On avait pour la palabre tout le jour devant soi ! Et l'on ne s'en priva pas !

Des bulles, des bulles, des bulles ... On en fit, des bulles !

Ce sont les jeunes qui parlèrent les premiers et l'on n'entendait qu'eux, en une sorte de brouhaha assez désordonné. Ce fut ensuite le tour des plus vieux : Ils étaient plus calmes, mais ils étaient souvent aussi plus pédants. Il fallait entendre les intonations doctorales de leurs discours !

On se forma en cortège, les plus gros devant, les plus petits derrière, comme à l'habitude. On agita des drapeaux et des nageoires en criant des slogans. Il y avait des drapeaux bleus, des drapeaux blancs, des jaunes, des bariolés multicolores. On brandit même des banderolles ! On criait pour réclamer la paix, la sécurité, pour demander une pitance plus abondante. Et même, il y en avait qui réclamaient ... à boire ! Il faut croire qu'ils avaient oublié qu'ils vivaient dans le bain ! Ou bien c'était autre chose que de l'eau qu'ils voulaient boire ?

Le soir venu, on s'aperçut que l'on n'avait rien décidé du tout. Il était pourtant l'heure de se séparer : le dimanche, ça ne dure qu'une seule journée, même le dimanche du quinze août ! Les cloches avaient sonné les vêpres ... Si, si, sous les eaux, on les entend très bien ! Les cordonniers nomment une commission d'étude pour préparer une motion, puis ils se séparent en promettant de se retrouver.

C'est égal, on avait passé une bien bonne journée !


Un petit cordonnier reste là, tout seul, dans le fond de l'Anse Lascar.

-" c'est bien beau, tout ceci, mais cela ne fait pas mon affaire ! Demain comme hier, il faudra faire face aux vagues pour se mettre à table. Il faudra toujours braver les pinces, les mandibules, les bêtes qui ont des carapaces, celles qui ont des antennes, celles qui ont des dents ou des tentacules ! ... Et puis, on se fait bousculer ... On doit parfois traverser des courants qui sont très froids ... Sans compter qu'au bout du compte, on ne trouve pas toujours grand chose à manger ... "

-Il était tout petit, notre cordonnier gris et il réfléchissait : Comment s'assurer tout à la fois la paix, la sécurité, la tiédeur et la pitance ?

-"Ah ! Bien sûr, si on avait eu un véritable lagon ! "

Oui, mais voilà, on n'avait pas de lagon ! Il réléchit tant et si bien, notre petit cordonnier gris qu'il finit par imaginer une solution bien à lui ... C'était une solution bizarre, mais enfin ... C'était une solution, demain serait meilleur qu'aujourd'hui !

Le cordonnier va rouver le croissant, son voisin. Et voici ce qu'il lui demande :

-"Tu vas m'avaler, croissant. Mais tu ne me fera pas de mal. Je resterai bien sage dans ton ventre. Je tele promets, je ne te gênerai pas.Je ne bougerai pas.

Allons donc ! Et le plus beau, dans cette affaire, c'est que le croissant accepte. Il ouvre une large gueule, le cordonnier y entre, la queue la première.

Ils vécurent ainsi quelque temps, heureux après tout ! Pour le croissant, c'est vrai, le cordonnier n'était guère gênant, tant qu'à celui ci, il était ravi ! Son ami le protégeait, le gardait au chaud et même il le nourrissait ! Chaque fois que le croissant mangeait, le cordonnier n'avait qu'à ouvrir la bouche ! C'était tellement épatant que tous les cordonniers en firent autant.

Et voilà que les croissants se mettent à réfléchir eux aussi ... Ils sont plus forts que les cordonniers, plus impressionnants aussi, grâce à leurs couleurs et à leur queue ... en croissant ! Cependant, les croissants, eux aussi, ont leurs ennemis ! Où pourraient-ils se mettre à l'abri, eux qui abritent si parfaitement les petits cordonniers ?
Parbleu ! L'un d'entre eux trouva la bonne idée ... Le bourgeois, bien sûr ! ... Le bourgeois a une si grande bouche et un si gros ventre !

Le croissant va chez son voisin ... Affaire conclue ! Le croissant entre dans le ventre du bourgeois, la queue la première.

Cela dura longtemps : tout le monde se trouvait au chaud et en sécurité ... Heureux !
C'était le bourgeois qui ouvrait la bouche. En se nourrissant, il nourrissait le croissant, qui nourrissait le cordonnier à son tour.
Cela aurait pu durer longtemps encore ... Et pourquoi pas toujours ? Les bourgeois eux-mêmes se mettaient à envisager de se réfugier dans le ventre du plus gros d'entre eux ... Vous savez bien : Le gros, gros bourgeois qui vit à Police-Bay ... Si gros, si gros qu'il aurait bien pu avaler, à lui tout seul ... Tous les autres bourgeois !


Oui, mais voilà !


Les cordonniers sont changeants et virevoltants, c'est ainsi, que voulez-vous !
Ce fut le petit cordonnier que nous connaissons qui parla encore le premier. Vous vous souvenez de lui ? Celui qui avait eu " la bonne idée" ! Le petit cordonnier tout gris ...
Au fond ... Je ne sais même pas s'il parla : Peut-être bien qu'il pensa seulement, mais alors il pensa si fortement que tout le monde l'entendit.


-"Je m'ennuie, dans le ventre de ce croissant : Il n'y a pas de place pour bouger, tant et si bien que je suis obligé d'aller où il va, quand il le veut. Il y a pire : C'est que je ne peux manger que ce que le bourgeois veut bien choisir pour son déjeuner et ce que le croissant me laisse ! "
Et voilà que le croissant songe aussi et si fort que tout le monde l'entend. Il se plaint : La présence du cordonnier lui pèse. Et puis, lui-aussi se trouve à l'étroit, dans le ventre du bourgeois. Enfin, il peut en dire autant que le cordonnier, étant à peu près dans la même situation que lui :


Ah oui, en voilà un qui se plaint de ne pas pouvoir manger ce qu'il veut, quand il le veut ... Qu'est-ce qu'il s'imagine ? Est-ce que j'ai la liberté de choisir, moi ? C'est le bourgeois qui choisit ce qu'il veut, quand il le veut, là où il le veut ! "

Vraiment, ce n'était plus supportable, pour personne ! Que voulez-vous, c'est ainsi : Personne n'est jamais satisfait de ce qu'il a ! Les poissons changent toujours d'idées. Donnez leur ce qu'ils ont demandé, ils n'en veulent bientôt plus ! Les poissons, c'est ainsi ! Et ce serait bien autre chose encore lorsque l'énorme bourgeois, celui de Police-Bay, aurait tout avalé ! Mais de ce côté on s'aperçut bientôt qu'il n'y avait plus de risques : Ce gros, gros bourgeois tout rouge ... Vous savez, celui qui avait un si gros ventre ... Il avait disparu ! On ne l'a jamais revu ... Et peut-être, après tout, on avait seulement cru qu'il existait ...

Les bourgeois, les croissants, les cordonniers ... tout le monde tomba d'accord. Chacun ouvrit la bouche. Chacun reprit sa liberté. Et même, à ce moment là, on s'aperçut que les cordonniers avaient mis dans leurs ventres les tout petits poissons Tann, tout bleus, tout petits. De la bouche du bourgeois sort le croissant. De la bouche du croissant sort le cordonnier. De la bouche du cordonnier sort le petit poisson Tann.

Ce fut une très belle fête : On fit des farandoles et des cortèges. Il y avait des bannières de toutes les couleurs !
Ceux qui étaient les plus imposants parmi les poissons, ceux quii avaient une casquette et des galons dorés, ceux là sont montés sur une corolle de corail. Ils ont fait de beaux, très beaux discours, à tour de rôle. Après les discours, tout le monde fit des bulles, des bulles, des bulles ! Qu'est-ce qu'il y en avait, des bulles ! Tout le monde était heureux


Mais ce qu'on avait oublié, c'est que ce n'était pas le quinze août, ce jour là. Et que ce n'était pas un dimanche !

Pendant que tout le monde dansait ... On m'a raconté que ce sont les pêcheurs qui ont ramassé tout le monde dans leurs filets ! D'aucuns disent que c'est le gros bourgeois de Police-Bay qui est revenu ...Allez donc savoir !

Le peu de poissons qui restaient ... Ce sont les bêtes à cornes, à pinces, à carapaces, à tentacules et à antennes qui ont fait un grand festin.


Comment je sais tout cela ?

-"C'est un petit poisson bleu qui me l'a conté ... Le dernier des petits poissons bleus. Après lui, il ne restait plus personne, ni un cordonnier, ni un croissant, ni un bourgeois gros ou petit ...

Alors, ne vous étonnez pas s'il n'y a que moi qui connaisse cette histoire ...

mercredi 29 octobre 2008

LE CARDINAL DE MADAGASCAR












Le grenadier de mon jardin est en fleurs. Est-il couvert d'oiseaux ou bien est-il couvert de fleurs ? On ne sait pas très bien car l'oiseau Cardinal et la fleur du grenadier sont de la même couleur rouge-ponceau. Le fruit, lui, coeur trop plein d'amour se fend et saigne quand il est bien mûr ...

Quant à l'oiseau qu'on appelle Cardinal, et qui est effectivement de la même couleur que la calotte d'un prélat ... Saviez-vous que le Cardinal est réellement l'oiseau du Christ ?

-" Laissez voleter les oiseaux du ciel ... Ils n'ont pas à se préoccuper de leur pitance : Le Bon Dieu y pourvoit ! "

Dans la communauté des oiseaux, il y en a de blancs, il y en a de noirs, il y en a de gris, et même on connaît des oiseaux bleus ! Mais aussi, O merveille, il y en a qui sont versicolores ! ... Cela signifie qu'ils changent de couleur. Tel qui était gris deviendra blanc adulte devenu, tel autre qui était jaune deviendra bleu ! Certains changent de couleurs au fil des saisons.

Le Cardinal, (on le dit Cardinal de Madagascar ) lui, porte successivement au cours de la même année un vêtement de deuil puis un habit de cérémonie : livrée terne, puis jacquette écarlate. J'entends ici parler du Cardinal mâle, car la femelle conserve blouse grise tout au long de l'année.



- " Mais que nous chantez-vous là ? "



- " je ne vous dis que la vérité : Il suffit de bien observer ! En novembre, le Cardinal se vêt d'écarlate. Si vous êtes très attentif,vous remarquerez que, pour se parer, le Cardinal attend le lendemain de ... La Fête des Morts " ... Laquelle arrive juste après celle de la Toussaint ... Dame, il ne serait guère convenable d'endosser ses habits de fête avant d'avoir célébré la mémoire des morts !"



-" Vous voulez dire que le Cardinal porte le deuil ? "

-" Cela me semble évident. Il garde son plumage triste, gris-brun, jusqu'à la Fête des Morts ! "



Je parlais donc du grenadier de mon jardin : Il a fleuri. Voici venir l'Avent ... Quatre dimanches avant que ne se fassent entendre les carillons de Noël. Le Cardinal est en fête, rutilant comme les fleurs du grenadier !

Noël, c'est la joie. Viendra l'Épiphanie. Saint Nicolas est vêtu de pourpre, les Rois-Mages aussi ! Ce n'est qu'en avril que le Cardinal remettra ses habits de deuil.
Le Cardinal, c'est l'oiseau du Christ ! ... Souvenez-vous; souvenez-vous ...

" En ce temps-là, Jésus fut cloué sur une croix. Sur un écriteau, on avait écrit : " Voici le Roi des Juifs".
À droite, on avait planté une autre croix de bois. Il y en avait une troisième à gauche. Sur chacune de ces deux autres croix, on avait cloué un voleur. Souvenez-vous : Marie pleurait, à genoux, et Jean, et Marie-Magdeleine. L'un des deux larrons croyait en Dieu :

-" En vérité, je te le dis, tu seras sauvé et tu seras assis à la droite de Dieu, avec les bienheureux ! "



Jésus souffrait. Il appela son père : 

- " O ! Père, pourquoi m'avez-vous abandonné ? "



Le tonnerre éclate. Les éclairs zèbrent les cieux. La terre tremble. Jésus se meurt ... Jésus est mort.



Au moment où il rend son âme à Dieu, je veux croire qu'apparaît la colombe, messagère de l'Esprit-Saint. Un soldat romain pique Jésus au flanc, de la pointe de sa lance ...

Tout ce que je vous raconte là, nul ne peut le contester, c'est bien vrai : c'est écrit dans les Évangiles. Ce que je vais vous raconter ensuite, peut être ne s'agit-il que d'une belle histoire. Mais, si c'est une belle hstoire, pourquoi est-ce que je ne vous la raconterais pas ?


Cela commence au moment où le soldat romain pique le flanc du Christ. De la plaie, tombent deux gouttes. La première est une goutte d'eau. La seconde est une goutte de sang. Deux larges gouttes ... Une goutte claire, une goutte vermeille ...

Il ne faut pas qu'elles tombent et se perdent sur le sol !

-" Miracle, crie le Bon Larron en rendant le dernier soupir ! "

Avant qu'elles n'aient touché terre, les deux gouttes ont déplié des ailes ! Elles se sont envolées ! Toutes les deux sont devenues des oiseaux du Christ. L'un était rouge, et c'était le mâle, l'autre était gris, et c'était la femelle. Tous les deux sont allés se poser sur la branche d'un grenadier.

Et c'est depuis ce temps-là que le fruit du grenadier, coeur trop plein d'amour, se fend au soleil, et saigne. C'est aussi depuis ce jour-là que les fleurs du grenadier ont les mêmes couleurs que le Cardinal mâle en habit de fête !



-" Mais pourquoi appelle-t-on ce petit oiseau le Cardinal ... de Madagascar ? "

-" Ce serait encore une belle histoire ... Faut-il y croire ? Faut-il y croire ?



-"Allez dans le monde entier, et prêchez la Bonne Nouvelle : Jésus est ressuscité ! " dit le Christ à ses apôtres ...



Avant de se poser sur le grenadier, les deux oiseaux se seraient posés sur la main droite de Jean ... d'autres disent que c'est sur la main de Marie-Magdeleine ... Allez donc savoir !

Vous avez entendu parler de Saint François d'Assise ? Au treizième siècle, on disait en Italie qu'il était "le Petit Frère des Pauvres". On dit qu'il était tant aimé de tous que chacun accourait pour le voir et pour l'écouter. On dit même qu'il parlait aux oiseaux, ses " Petits Frères du Ciel " !


Parmi les oiseaux qui venaient l'écouter, il y avait ... Les Cardinaux ! Cela ne fait aucun doute;

Les douze apôtres ayant parcouru le monde entier, sur la main duquel d'entre eux le Cardinal était-il arrivé en Italie ? Et puis, et puis ... C'était au monde entier qu'il fallait porter la Bonne Nouvelle. Et je crois bien que c'est ... le Cardinal, ce petit oiseau à la livrée versicolore ... Je crois que c'est le cardinal qui, ayant bien écouté le sermon de Saint François d'Assise, partit le premier vers l'Océan Indien pour dire à chacun :

-" Christ est ressuscité ... Aimez-vous les uns les autres ... "


Jetez du riz, petits enfants, jetez du riz. Les Cardinaux viendront le picorer. Qu'ils soient rouges, qu'ils soient gris ... Jetez du riz pour les oiseaux du Christ !

mardi 21 octobre 2008

LA BOUTEILLE DE JEAN-BAPTISTE



C'est une histoire que ma grand'mère me raconte, le soir; lorsque le soleil se couche derrière l'île Silhouette et que nous sommes assis sur le sable blanc. La mer est douce comme du lait. Le vent sent la cannelle et la girofle.

Je ne sais pas où, je ne sais pas dans quel pays se passe cette histoire : C'est peut-être ici, c'est peut-être ailleurs ...

Il était une fois ... Toutes les histoires commencent ainsi, n'est-ce pas ?
Il était une fois un petit garçon qui s'appelait Jean-Baptiste. Il était très brun et il avait dix ans. Il avait de beaux yeux, surprenants car ils étaient tout bleus. Il avait de longues jambes, quand il marchait, on eût dit qu'il dansait.



Depuis longtemps, Jean-Baptiste n'avait plus de maman. Il est plus triste encore d'apprendre que le papa de Jean-Baptiste est mort ce matin. Pour tout héritage, Jean-Baptiste a trouvé une bouteille, une grosse bouteille en verre.

-" Que voulez-vous qu'il en fasse ? "

Que peut-on bien faire avec une grosse bouteille en verre ? Jean-Baptiste la regarde. Elle est bizarre cette bouteille : Son goulot n'a pas de trou. Pas de trou, pas de bouchon ! Tu peux la tourner et la retourner, elle est fermée de partout !

- " Que veux-tu faire avec une bouteille qui n'a pas de trou ? "

- " Tu ne peux ni la remplir, ni la vider ! "

-" Mon garçon, cette bouteille est un trésor ", avait dit papa avant sa mort.

- " Elle est ronde. Elle est verte. Elle est vert et bleu "...

- " Elle est verte, ou elle est bleue" ?

- " Elle est vert et bleu, comme l'océan. "

Elle est grosse, cette bouteille : De ses deux bras tendus, Jean-Baptiste en fait tout juste le tour, tout juste !

-" C'est un trésor, a dit papa, ne l'abandonne jamais. Prends bien garde à ne pas la casser : c'est fragile, c'est du verre ! Où que tu sois, si tu regardes bien, tu verras dans la bouteille un poisson chinois "

- "Un poisson chinois ? "

_ " Oui, bien vivant ! Il est parfois rouge, parfois bleu, parfois vert ou même couleur d'argent ... "

- " Il change de couleur ? "

- " Il change de forme et il change de couleur. Il a parfois de longues nageoires, parfois il n'en a presque pas. Parfois il a de gros yeux et parfois ils sont tout petits. Tout à l'heure il était tout en longueur, maintenant, le voilà tout rond. Il ressemblait à un papillon, le voilà semblable à une fleur et le voici de toutes les couleurs .

-" Mais qu'est-ce qui le fait changer de forme et de couleur ?"

-" Si tu regardes un oiseau, si tu le regardes bien, le poisson prend ses couleurs. Il prendra aussi sa forme. Si tu regardes une fleur, si tu la regardes bien, le poisson prendra sa forme, un peu, et ses couleurs aussi. Si tu contemples un ciel plein d'étoiles, si tu le contemples longuement, le poisson sera tout moucheté de blanc. Si la lune brille, il en prendra la forme et il sera tout argenté."

-" Chaque fois que tu regardes quelque chose, le poisson change ? "

- Oui mais attention : Chaque fois que tu passeras à côté de quelque chose sans le regarder, le poisson chinois perdra ses couleurs. Il deviendra de plus en plus gris et de plus en plus petit ! "

-" Mais par où est-il entré dans la bouteille, le poisson chinois ? Par où est-il entré, puisque le goulot est complètement bouché ? "

-" Cela, c'est une autre histoire ! Garde-toi bien de te montrer trop curieux à ce sujet ! "

Jean-Baptiste essuie ses larmes. Il prend la bouteille entre ses bras. Il la serre contre son ventre. Il part sur le chemin, tout droit ...



Survient une chenille. Elle rampe sur le bas-côté.

-" C'est laid, une chenille ! "

Justement, celle-là, elle est très belle : Elle est verte, avec de petits points rouges. Elle a de long poils jaunes.

-"Dieu que c'est beau ! "

Jean-Baptiste s'arrête. Il pose la bouteille tout doucement. Il s'assied dans l'herbe. Il regarde longtemps la chenille : Elle étire un fil ... Elle s'enveloppe dans un joli cocon lisse et blanc. Et puis voilà qu'un beau papillon sort du cocon. Il a des ailes comme de la soie, de la soie de Siam. Il est bleu, avec des points rouges. Il a des antennes : On dirait des plumes !

-" Et le poisson chinois ? "

-" Il monte, il descend et il remonte dans la bouteille, du fond jusqu'au goulot et du goulot jusqu'au fond ... Il a des nageoires comme des foulards de soie. Il est tout bleu, avec des pois rouges.

- " Comme le papillon ! "

-" Avant, il était tout allongé, comme la chenille ... Et vert et rouge comme elle ! "



Jean-Baptiste rencontre ensuite un ruisseau, au bord de son chemin. Dans le ruisseau, il y a un petit têtard. Jean-Baptiste a bien failli ne pas le regarder.

-"Un têtard, c'est tout noir et ce n'est pas très beau ..."

Mais Jean-Baptiste regarde dans sa bouteille : le poisson chinois est en train de perdre ses couleurs. Alors, le garçon pose sa bouteille dans l'herbe, bien doucement pour ne pas la briser.

- "J'ai compris ! Le têtard est en train de devenir une grenouille ! "

Justement, une très belle grenouille, rose avec des yeux bleus ... Avouez que ce n'est pas commun, une grenouille rose avec des yeux bleus !

Et le poisson chinois devient tout rond et tout rose ...

-" Avec des yeux bleus ! "

Il était temps que jean-Baptiste fasse attention : Le poisson chinois avait commencé à rétrécir. Il était devenu tout petit, tout petit. Il aurait tellement diminué qu'il aurait bien pu disparaître tout à fait si Jean-Baptiste n'avait pas porté attention à ce petit têtard, tout noir et tout vilain ! Ensuite, Jean-Baptiste continue son chemin. Tout à coup , il s'arrête à nouveau.

- "Qu'est-ce qu'il a vu ? "

- " Une graine, une petite graine, toute grise, toute sèche, toute ridée ..."

-" Ce n'est pas très beau, une petite graine toute sèche ..."

-" Non, ce n'est pas très beau." Jean-Baptiste va passer ... Mais dans sa bouteille, le poisson chinois redevient tout petit, tout petit. Le garçon pose sa bouteille, un peu trop vite, même : Elle a failli se heurter aux cailloux du chemin ! Une goutte de pluie tombe, la graine germe, deux feuilles se déplient sur la tige, puis s'ouvrent des fleurs, de toutes les couleurs !

-" Et le poisson chinois ? "

-" Jamais on n'a pu voir un poisson aussi beau : Ses nageoires sont comme des pétales ! Et puis .... Ces couleurs ! "



Plus tard encore, Jean-Baptiste trouve un oeuf. C'est beau, un oeuf ! Le poisson chinois devient tout rond. Il est presque transparent, comme une coquille ..; Et puis voilà que naît le poussin, et le poisson chinois deevient tout jaune. Il change encore lorsque le poussin devient un oiseau ... C'est un paille-en- queue ! Le poisson chinois voit pousser, à la place de sa nageoire caudale, une longue queue, très effilée.

-" J'ai compris ! "



Jean-Baptiste a tout compris : Tout est beau, il suffit de bien regarder ! La chenille devient papillon, le têtard devient grenouille, la graine noire devient bouquet de fleurs, l'oeuf tout rond devient un oiseau ... D'un caillou, on fait un bijou, un morceau de bois devient un joli bateau, un roseau devient un pipeau ou bien un sifflet ...



Quant aux hommes et aux femmes, quant aux garçons et aux filles, il suffit de les regarder aux fond des yeux ... Grands ou petits, bruns ou blonds, habitant ici ou bien ailleurs, leurs prunelles sont toujours merveilleuses !


Jean-Baptiste comprend tout : La bouteille est un trésor, papa l'avait bien dit ! Quand on regarde tout, quand on sait regarder et admirer, sans à priori, tout devient beau ! C'est comme ça que l'on devient un grand poète. C'est aussi comme ça que l'on devient un grand savant ...



Si vous trouvez par hasard la bouteille de Jean-Baptiste ( des fois qu'il l'aurait laissée quelque part ...), ramassez-la. Surtout n'allez pas la casser ! ... Dedans, vous ne trouveriez rien, ni poisson chinois, ni poisson anglais, ni poisson français, ni même un poisson créole ... Rien, rien, rien du tout ! ... Et pourtant !

lundi 20 octobre 2008

LES ROUSSETTES


En ce temps-là .... C'était quand ? C'était quand ?

-"C'était bien avant l'arrivée des grands bateaux."

C'était où ? C'était où ?

-" Eh bien, c'était aux îles Seychelles, pardi !"

En ce temps-là, les roussettes étaient comme les rats : Elles trottaient et elles couraient sur le sol, et puis elles grimpaient dans les cocotiers et aussi dans les manguiers.

-"Mais, des roussettes, qu'est-ce que c'est ? "

-"Tu les entends la nuit. Tu les entends couiner, grogner, grincer comme des charnières rouillées. Elles sont dans les manguiers, dans les cocotiers, dans les pappayers. Elles mangent des fruits, elles mangent des fleurs. Au petit matin, elles repartent dans la montagne et leurs ailes lourdes sont noires contre le ciel blanc.

En ce temps-là, donc, les roussettes n'avaient pas d'ailes. Elles couraient sur leurs pieds, de toute la vitesse de leur petites pattes.On pouvait les voir filer entre les buissons, entre les arbres. Mais personne ne les voyait parce que ... Dans les ^lesn il n'y avait personne ! C'était bien avant l'arrivée des grands bateaux. Il n'y avait que les crocodiles, il n'y avait que les tortues pour voir courir les roussettes à la nuit tombée.

La roussette, au fond, ressemblait à un petit chien, à un petit renard. Elle avait les yeux vifs et les oreilles dressées. Elle avait le poil roux, marqué de noir. Tout comme maintenant. Seulement, elle n'avait pas d'ailes et elle courait.

-"On l'appelle roussette. On l'appelle chauve-souris."

Mais à cette époque, en ce temps-là, je ne sais pas comment on la nommait. D'ailleurs, qui l'aurait nommée ? Il n'y avait personne dans les îles ... que des crocodiles, des tortues et des paille-en-queue. La roussette, elle, dormait tout le jour, la tête en bas, pendue en haut d'un albizzia.

-" il y avait des albizzias ? "

-" À vrai dire, je ne suis pas sûr qu'il y en avait. Mais les chauves-souris dormaient toute la journée, tout en haut des arbres les plus hauts, sur les sommets des montagnes. Le soir, elles se laissaient glisser jusqu'à terre. Elles grimpaient dans les arbres fruitiers. Elles se goinfraient de de fleurs, elles se goinfraient de fruits, comme aujourd'hui, en poussant des petits cris de plaisir ! "

-"Tu les a vues, les chauves-souris ? Leurs ailes sont des membranes tendues entre leurs doigts. Le jour, comme je l'ai dit, elles sont pendues la tête en bas, accrochées aux branches par les pattes de derrière. Elles s'enveloppent dans leurs ailes noires et se cachent les yeux pour dormir. Elles ne sortent qu'à la nuit.

Mais comme, en ce temps-là, les roussettes n'avaient pas d'ailes ... elles ne volaient pas, c'est évident ! Une nuit, elles se sont aperçues avec affolement qu'elles avaient tout mangé ! Dans les branches, il n'y avait plus un fruit, plus aucun ! Plus une mangue, plus une papaye jaune, plus une papaye rouge, ni un seul avocat ! Il n'y avait même plus une fleur dans les cocotiers !

Le problème était grave : Qu'allait-on manger ? Je crois bien que le jour suivant personne n'a dormi !On s'est rassemblé dans une clairière, à Sans-Souci. On en avait pourtant, des soucis ! Comment faire, et qu'allait-on manger en attendant la prochaine saison des fleurs, la prochaine saison des fruits ? L'assemblée se mit à délibérer.

On voulait bien essayer de manger des racines, des feuilles, des vers, des sauterelles ... Mais ce n'était pas là des nourritures pour des chauves-souris ! On a parlé longtemps, longtemps ... Et puis le soir est arrivé. On n'avait toujours rien trouvé ! Dans les branches on entendait pleurer les bébés roussettes, tant ils avaient faim !

Un jeune mâle n'avait rien dit. C'était un jeune de l'année précédente, aux idées modernes et audacieuses. Il était beau, il était fort et il avait beaucoup d'imagination. Pendant que les autres discouraient, il réfléchissait :

-"Le soir arrive. Le soleil descend, tout au fond, sur l'océan. Il va se coucher derrière l'île voisine dont les arêtes se parent de jaune et de rouge tandis que la montagne devient noire. Et c'est pour cela qu'on l'appelle l'île Silhouette. Dans cette île, il doit bien y avoir des fleurs. Il doit bien y avoir des fruits ... Oui, mais voilà : Comment y aller, dans cette île ?

Cet adolescent était sportif et sûr de lui. Sans rien dire à personne, il est descendu jusqu'à la plage. Il a coupé une feuille de bananier;

-" il faut que j'arrive jusqu'à l'île voisine ! "

Dans la feuille de bananier il s'est taillé des ailes. Il es a fixées entre ses doigts, il les a collées tout au long de ses bras, et puis ... Il s'est envolé ! Il a volé toute la nuit, en battant des ailes d'un vol lourd, comme les roussettes le font encore aujourd'hui. Mais quand l'aurore est arrivée, il était encore très loin de l'île dans laquelle il voulait se rendre, très loin et perdu au-dessus de l'océan. L'aube était déjà dépassée : Le ciel était tout embrasé. Comment faire ? Les chauves-souris ne volent pas pendant le jour, elles ne sortent que pendant la nuit !

Alors, notre roussette est descendue jusqu'à la surface de la mer, qui était bien calme, sans vagues et sans rides. Elle s'est couchée sur le dos, faisant "la planche", comme on dit. Elle a replié ses ailes à demi. Une bise légère les a gonflées. La roussette a navigué comme un voilier, en s'abritant les yeux pour ne pas être aveuglée par la lumière du soleil. Elle est allée jusqu'à l'île Silhouette, celle que l'on voit si bien de la plage de Beauvallon, souvent couronnée de brume le matin et noire au crépuscule, à contre-jour sur fond de nages rouge-orangé.

À Silhouette, il y avait une multitude de fleurs et de fruits. Aucune chauve-souris n'était encore allée jusque là. Le lendemain, notre roussette est retournée chercher toutes ses amies. C'est depuis ce temps-là que les roussettes ont des aies. On les voit tourner dans le ciel, un peu avant la tombée de la nuit. Elles reprennent leur vol un peu avant le lever du soleil.

Mais on dit ... On dit que, parfois, des pêcheurs dans leurs barques aperçoivent un plein jour les chauves-souris sur l'océan, quand il est bien lisse. Elles se laisseraient pousser par la brise, en repliant légèrement leurs ailes pour se protéger les yeux. Elles se rendraient à Silhouette, comme de petits bateaux à voiles.

Certains les auraient entendues, bien loin au large ... Ils racontent qu'elles couinaient, qu'elles grinçaient .... comme de vieilles charnières rouillées !

dimanche 19 octobre 2008

LE RAT ET LA TORTUE


C'était un jour, au temps longtemps. Les îles étaient inhabitées. Elles n'étaient fréquentées que par les oiseaux qui venaient par les airs et les tortues qui venaient par les eaux.

Il y avait bien aussi les tortues terrestres, mais celles-là, elles étaient venues on ne savait d'où, on ne sait comment, on ne sait quand.

Arrive un rat. personne n'a pu me dire comment il arriva. Peut-être s'était-il accroché à l'un de ces grands troncs d'arbres qui dérivent dans l'océan, venant de Madagascar ou bien d'ailleurs. Ils finissent par s'échouer sur un rivage, dans les rochers ou sur la plage.

Un rat, donc, survint ... C'était au temps longtemps, au temps où les rats n'avaient pas de queue : C'était comme cela, que voulez-vous ? Les rats n'avaient pas de queue.
C'est drôle, un rat sans queue, non ? Celui-là n'en avait pas.



Imaginons donc : La mer rejette un grand tronc d'arbre sur un rocher, un rocher pas bien gros, perdu, tout seul au-milieu des flots. Je crois ... Il est possible que ce soit sur Brisard, l'écueil qui se trouve juste au nord-ouest de Mahé, tout près de Victoria.

Vous pouvez imaginer si le rat était heureux, après tant de jours à la dérive, balloté par les flots ... Il en avait le mal de mer et le coeur lui remontait au bord des lèvres ! Il met pied à terre, ( je devrais plutôt écrire "il met pattes à terre" ). Tout aussitôt, il monte en haut du rocher, juste à temps pour éviter d'être repris par une vague plus grosse que les autres : Il avait bien failli se faire mouiller les fesses! (Pas la queue, vous vous souvenez pourquoi ! ).

Bon, le voilà en haut, à guère plus d'un mètre au-dessus des flots, à vrai dire.

-"Très beau, tout ceci, mais il faut partir de là, et vite ! D'abord parce que je ne sais pas si la mer monte ou descend. Est-ce que ce rocher est noyé à marée haute ? Et puis, de toute façon, j'ai faim ! Il faut que je trouve à manger : ici, il n'y a rien !"

La côte n'était pas très éloignée. Notre rat voyait très bien la pointe Conan et la pointe du Nord. Il y avait là-bas beaucoup de cocotiers. C'est bon, les noix de coco ! Le rat sait très bien grimper le long d'un tronc, aussi long et aussi haut soit-il. Quand il a trouvé une grappe de noix, il choisit la plus belle. Il la ronge, il la creuse jusqu'à ce qu'il trouve l'amande, si tendre sous la dent !

Oui, mais voilà : comment aller jusqu'à la côte ? Notre rat ne sait pas nager.

-" Les oiseaux pourraient bien me transporter Il y a beaucoup d'oiseaux : Des sternes, des fous, des frégates noires mais ... Allez donc faire confiance à un oiseau ! Ils pourraient bien me laisser choir ! Et puis ... Qui sait si les oiseaux ne mangent pas les rats ?"

Le rongeur ne demande donc rien aux oiseaux, mais il a de plus en plus faim et ...

-"Hou là là ! Ayo ! je crois bien que la marée commence à monter !"

-"Un poisson pourrait bien me prendre sur son dos. Justement, il y a plein de poissons : des bécunes, des bourgeois, des carangues et des tazars ... Mais allez donc faire confiance à un poisson : Il pourrait bien me noyer en route ! Et puis, il y a peut-être bien des poissons qui mangent les rats !"

Le rongeur ne demanda donc rien aux poissons. Mais il avait de plus en plus faim ! Et puis ...

-"Hou là là ! Ayo ! C'est certain, la marée monte! "

Et tous ces cocotiers là-bas, dans l'île voisine ! Mais voilà, c'était un rat sans queue, un rat qui ne savait pas nager !



Arrive une tortue, une grosse tortue de mer. C'est placide, une tortue, c'est calme, c'est gentil ..;

-" Eh ! Tortue ! Ma chère tortue ! Tu veux bien me prendre sur ton dos ?"

La tortue accepte;

-"Mais ... Tu me promets que tu ne plongeras pas ? "

-"Allez, monte. Je te promets que je te débarquerai sain et sauf."

.... Et la mer qui a monté ! Elle atteint presque, déjà, le sommet du rocher.

-"Grimpe vite, ou tu vas te noyer ! "



Le rat monte sur la carapace de la tortue et, la tortue, en nageant, se dirige tout droit vers la pointe Conan. Mais une tortue qui nage, ça bouge, ça gigote ! Sur l'écaille, le rat n'arrive pas à accrocher ses griffes.Ses ongles dérapent. Il glisse! Il va tomber dans l'eau !

Non : Il s'est avancé jusqu'au cou de la tortue et il a planté ses griffes dans la peau.

-"Tu me fais mal ! "

-"Ne plonge pas ! Tu l'as promis ! "

La tortue ne plonge pas, mais elle souffre.Ce sont ses griffes et ses dents que le rat lui a enfoncés dans la peau du cou ! Elle nage, elle nage le plus vite possible ... Enfin, tout essoufflée, elle arrive à la plage. Le rat a déjà sauté à terre. Sans prendre seulement le temps de dire merci. Il court vers les cocotiers, de toute la vitesse de ses quatre pattes. Diable ! C'est qu'il a grand faim !


Mais à ce moment-là, la tortue s'aperçoit que le rat ne s'est pas contenté de mordre et de griffer ... Cela, elle peut le comprendre, puisque le rat avait si peur de tomber à la mer ! Mais ce qu'elle ne supporte pas ... Ce qu'elle ne peut pas supporter ... Ah! Non ! Elle ne le peut pas !
... C'est qu'il a fait ses crottes, là, dans son cou !

-"Bandit sans respect ! Ignoble cochon ! Sale individu ! "

La tortue coupe une branche bien droite, en fait un javelot ... et le lance très fort en direction du rat qui grimpait déjà le long du tronc d'un cocotier. Le javelot se plante entre les deux fesses du rat :

-" Ayo !"

Et c'est depuis ce temps-là que les rats ont une queue. mais c'est aussi depuis ce temps-là que les tortues ont la peau du cou toute plissée, ridée ... Comme si elle était couverte de cicatrices ! Elles ont aussi la peau granuleuse ... Des petits granulés noirs ... Comme des crottes de rat !

Et puis, si vous ne me croyez pas ... Demandez donc à ma grand'mère, Léonie Lajoie, qui habite à "Ma Confiance" ... Vous verrez, elle confirmera tout. Elle vous dira que mon histoire est vraie. Et ma grand'mère Léonie Lajoie, vous savez, elle sait tout !

mercredi 8 octobre 2008

L'ARCHE DE NOÊ

















En ce temps-là ... En ce temps là ...
Mais prêtez-moi toute votre attention, vous qui me lisez en ce moment. Prêtez-moi bien votre attention car notre temps n'est pas loin de ressembler à ce temps-là.

Le Bon Dieu, qui était fort occupé ... Pensez donc, avec toutes ces étoiles et toutes ces planètes, alors que la plupart ne sont connues que de lui-même ! Il y a les planètes à faire tourner, chacune dans le bon sens et à la vitesse précise à laquelle elle doit le faire. Il y a les soleils et les étoiles qu'il faut allumer et puis qu'il faut éteindre, chacun à l'heure précise ou il doit l'être. Il y a les océans, qu'il faut faire monter ou descendre, chacun à l'heure prévue pour la marée. Il y a ... Il y a ... Imaginez un peu tout ce qu'il y a à faire dans ce grand univers !

Le Bon Dieu, bien qu'il fût très occupé s'arrêta un jour sur notre planète. Il s'assit tout en haut de la plus haute montagne, sans doute dans le massif de l'Himalaya. Il abaissa son regard et considéra les habitants de la terre, les hommes aussi bien que les animaux. Et ce qu'il vit à ce moment-là n'est pas loin de ressembler à ce que l'on peut voir en ce moment - partout, il ne voyait que des guerres, des crimes, des assassinats ... Tous ces êtres, qu'il avait créés pour vivre en paix ne savaient plus que se battre. Sur le monde entier, la violence était reine.

Les actes de l'homme, surtout, dépassaient la raison : Il ne chassait plus, il ne pêchait plus pour trouver sa nourriture, mais pour chercher son plaisir ! Curieux plaisir que celui de tuer des êtres vivants ! Ce n'était que carnages de lapins, de perdrix, de tourterelles, de truites, de saumons, d'espadons, de thons ... Les chiens eux-mêmes avaient été dressés pour courir après les biches et les cerfs. Pensez : Sur la terre, l'oiseau dodo avait déjà disparu, les tortues survivaient en nombre infime. Dans l'océan, c'était tout juste s'il restait quelques baleines. Les hommes les tuaient ... Ils ne savaient plus très bien pourquoi ils les tuaient, mais ils les tuaient toujours !

Je ne parle pas des guerres que les hommes se faisaient entre eux. Ici et là, dans les vallées, partout, sur les collines, au bord de la mer, en haut des montagnes, et même dans le désert, les injures montaient, le sang coulait. Ce n'était que haine, rapines et incendies, mensonges, vols, fourberies et incendies.

Le Bon Dieu lissa sa barbe et laissa courir son regard sur ce triste spectacle.

" Il est temps de mettre de l'ordre, se dit-il. "

Mais il avait remarqué, je ne sais trop où ni en quel pays, un homme qui se conduisait assez bien. Il était bon et sage.Il s'appelait Noë ... Vous avez déjà entendu parler de lui, bien sûr !
Dieu s'adressa à Noë et il lui dit : Mais vous savez déjà ce qu'il lui a dit !

-"il pleuvra pendant quarante jours. Il pleuvra pendant quarante nuits."

Noë avait compris. Aidé de ses trois fils, il entreprit la construction d'un grand bateau en bois. C'était vraiment un grand bateau, un bateau à trois ponts.

-"Tu y monteras avec ta femme, tes trois fils et tes trois belles-filles, avait dit le Bon Dieu, et tu embarqueras aussi un couple de chaque espèce d'animaux."

Noë, donc, embarqua tout ce qui marche, tout ce qui rampe, tout ce qui vole, car les oiseaux, par exemple, n'auraient jamais pu tenir l'air pendant quarante jours et quarante nuits, les chauves-souris non plus !

Un couple de hérons, donc, deux frégates, deux pigeons, deux cardinaux aussi, bien entendu, mais ces derniers ne tenaient pas beaucoup de place !

-" Mais, me direz-vous, que nous racontez-vous là ? Nous connaissons depuis longtemps cette histoire là !"

C'est vrai, et pardonnez-moi d'avoir été un peu long, mais c'est maintenant que mon histoire devient un peu nouvelle ... Croyez-moi ou ne me croyez pas, mais moi, e vous le dis comme ceci : L'arche de Noë vint aux Seychelles. J'ignore si c'était à Mahé, à Praslin ou à La Digue, mais je crois bien que c'était à Praslin parce que c'est là que l'on trouve des " Cocos d'Amour" ! Il avait fallu beaucoup d'amour pour construire et piloter l'arche et prendre soin de tous ces animaux !

Comment je sais qu'il est venu là ? Réfléchissez un peu et vous conviendrez comme moi qu'il est forcément venu. : Les animaux ne vivent pas tous dans les mêmes régions, dans les mêmes pays, sur les mêmes continents. Dans un pays, par exemple, il y a des rhinocéros, dans un autre il n''y en a pas. Dans un pays il y a des aigles, dans un autre, il n'y en a pas.
Les tortues géantes ... Il n'y en a pratiquement qu'aux Seychelles, tout au moins celles qui appartiennent à l'espèc que vous connaissez. Comment Noë aurait-il pu en emporter s'il n'était pas venu ici ? Où les aurait-il prises ?

Donc, avant l'ouverture des vannes du ciel et les robinets , le Bon Dieu avait dit à N oë de faire le tour du monde, sans oublier une seule île. Noë vint aux Seychelles. Il embarqua des tortues géantes, un couple de roussettes. Alors il considéra tous les autres animaux qui se trouvaient là.

-"Les poissons, inutile de s'en occuper, ils peuvent rester dans l'eau. Les mammifères marins, ils peuvent y rester aussi" ... Et c'était heureux : Où aurait-on mis deux baleines, deux rorquals, deux cachalots ? Il restait déjà fort peu de place depuis qu'on avait fait monter les éléphants !

Tout à coup, Noë aperçut un couple d'oiseaux tout blancs. On les appelle des aigrettes ( Madame Patton en langue créole ). Vous savez bien : ce oiseaux avec de longues pattes, de longs doigts, avec un long bec dont ils se servent pour attraper les poissons sur les étals du marché ! Mais, en ce temps-là, les aigrettes n'avaient pas ces longues pattes. Elles n'avaient pas ce long cou, ni ce long bec. Elles étaient totes blanches, certes, comme maintenant ... Mais elles avaient la forme de gros pigeons. D'ailleurs, en Créole, on ne les appelait pas "Madame Patton".

-" Halte là !"

Pas de chance, Noë les avait reconnues ...

-" Eh! Les aigrettes, pas la peine d'essayer de me tromper : j'ai dit deux seulement. Le compte y est déjà !"

Les deux aigrettes, dépitées, retournent sur la plage. Je ne sais comment, je ne sais qui les a aidées, voilà leurs pattes qui se sont allongées.

-" Il ne nous reconnaîtra pas, cette fois-ci ! "

Les deux aigrettes se présentent à nouveau au pied de l'échelle de coupée.Elles sont juchées sur leurs échasses et même leurs doigts se sont allongés ...

-" Tiens, se dit Noë, voilà de nouveaux oiseaux !"

Mais tout à coup :

-" Arrière, vous autres ! Je vous ai reconnues malgré vos longues pattes et votre long bec. Inutile de vous déguiser en "Madame Patton". Les " Madame Patton n'existent pas encore. Dieu ne les a pas encore créées !""

Vous remarquerez que c'est Noë lui-même qui a donné ce nom-là aux aigrettes pour la première fois. Quoi qu'il en soit, nos deux oiseaux se retrouvent à nouveau sur la plage. Que faire ?
Je ne sais comment. Je ne sais grâce à qui, mais voilà que nos deux aigrettes sont devenues toutes noires.

-"Allez, montez " dit Noë cette fois.

Et c'est pour cela qu'il y a de nos jours des "madame Patton". Vous me direz qu'elles sont blanches, et non pas noires ... Certes, certes ... Mais les blanches, ce sont les aigrettes qui étaient montées dans l'arche les premières. Elles n'avaient ni longues pattes, ni long cou, ni long bec. Cependant, elles ont bien été obligées, elles-aussi, de les allonger : Les animaux étaient si serrés dans ce bateau qu'elles n'arrivaient pas à attraper les bananes suspendues pour leur nourriture par Noë. Elles ont bien dû imiter les "Madame Patton" noires !

Mais n'avez jamais vu de " Madame Patton" noires, dites-vous ? ... Regardez mieux, soyez patients et attentifs. Il en existe bel et bien, de grands savants ornithologues me l'ont dit ! D'ailleurs, si vous voyez une " Madame Patton" noire, n'hésitez pas à nous écrire ... N'oubliez pas de joindre à votre envoi ... Une photographie de votre oiseau ! Et dites-nous où vous l'avez aperçu !

À LA PROCHAINE FOIS ... POUR UNE AUTRE HISTOIRE !